Balat inhoudstafel Dictionnaire des peintres belges

Biographie d'artiste


CHRISTUS, Petrus

Baarle-Hertog, vers 1410/1420 - Bruges, avant 1475
Peintre d'œuvres religieuses et profanes dont les thèmes se situent dans la tradition des Primitifs flamands. Les seules informations biographiques que nous possédions proviennent de documents d'archives du quinzième siècle où le nom de l'artiste est mentionné. "Baerle", le lieu de naissance de Christus cité par les archives, a suscité de nombreuses discussions. Une confusion est possible, en effet, entre deux villages portant ce nom : l'un situé à l'actuelle frontière belgo-néerlandaise, entre Tilburg et Turnhout (Baarle-Hertog), l'autre hameau étant situé entre Tronchienne et Deinze. Des recherches minutieuses dans les archives de Baarle-Hertog ont cependant établi que c'est là, sans conteste, que Christus a vu le jour. Les données concernant la carrière du peintre sont également très rares. Il était généralement admis que l'artiste avait reçu sa formation chez J. van Eyck et avait travaillé dans l'atelier du maître jusqu'à la mort de celui-ci en 1441. Il est cependant peu vraisemblable que Christus ait pu se trouver à Bruges avant 1444 et, en conséquence, qu'il ait jamais eu de contact personnel avec Van Eyck. Il est vrai qu'après son arrivée à Bruges, Christus a achevé quelques œuvres de Van Eyck et qu'il a perpétué sa tradition, en épigone. Il travailla pour la noblesse, la bourgeoisie et les autorités ecclésiastiques, réalisant quelques remarquables tableaux de dévotion, des retables ainsi que des représentations de saints et des portraits de donateurs. La thématique, comme l'iconographie et la symbolique de son œuvre prolongent celle de Van Eyck. Petrus Christus est demeuré à Bruges jusqu'à sa mort, située probablement avant 1475.A ce jour, les historiens d'art ne se sont toujours pas accordés au sujet de l'évolution stylistique du maître. Comme certaines peintures ne sont qu'approximativement datées et que, par conséquent, la chronologie précise de l'œuvre n'a pu être arrêtée, une controverse a surgi et deux groupes se sont constitués : les traditionalistes - M.J. Friedländer et E. Panofsky entre autres - et les modernistes - O. Pächt, W. Schöne et C. de Tolnay.Selon le point de vue traditionnel, l'œuvre de Christus se divise en trois périodes : au début de sa carrière, imitation de Van Eyck; ensuite influence marquée de Rogier van der Weyden ainsi que, dans une moindre mesure, du Maître de Flémalle; finalement, "conversion" à un style eyckien tardif. La première phase s'achèverait vers 1446 avec, comme point d'orgue, le "Portrait d'un chartreux" (New York, Met.). Cette période englobe encore des œuvres commencées ou préparées par Van Eyck mais, en fin de compte, achevées ou exécutées par Christus. Ainsi la "Madone de Jan Vos" (New York, Frick Coll.) et le "Saint Jérôme" (Detroit, Detroit Inst. of Art). Quelques œuvres typiquement eyckiennes comme l'"Annonciation Friedsam" et "La sainte Face", toutes deux conservées au Metropolitan Museum à New York, complètent cette période. A ce moment de sa carrière, Christus ne montre aucun caractère personnel et il lui reste encore à développer un style individuel. Style que l'on soupçonne à peine dans les œuvres de sa seconde période, dite analytique, couvrant les années 1446 à 1457. Là, Christus verse quelque peu dans l'anecdotique, ce qui serait partiellement imputable à son manque de pénétration de la symbolique complexe de Van Eyck. Ses sources d'inspiration sont multiples : il puise aussi bien dans l'héritage eyckien que dans le répertoire de l'école de Tournai et de celle de Haarlem. Ces influences hétérogènes confluent dans de nouvelles compositions comme celles des volets d'un triptyque de 1452 comportant l'"Annonciation", la "Nativité" et le "Jugement dernier" (Berlin, Staatl. Mus.). Sans cesse Christus tend à simplifier et à systématiser la forme et l'espace : il étale objets, personnages et paysages en bandes horizontales, ce qui accentue surtout l'aspect didactique de la composition. Il développe une troisième et dernière phase vers 1455. Elle se fonde sur sa tendance à la systématisation; l'œuvre y acquiert le caractère d'une "Andachtsbild" (tableau pour la méditation) dont la "Vierge et l'Enfant" de Kansas City et surtout la "Pietà" de Bruxelles (M.R.B.A.B.) sont des exemples éloquents. Elles comportent toutes les facettes de l'art de Christus : paysage, portrait, réalisme dans le détail et développement didactique. Au cours de cette dernière période, Christus revient complètement à la tradition eyckienne tardive : "Le Christ souffrant" (Francfort, Städel.), "La Vierge à l'arbre sec" (Madrid, coll. Thyssen-Bornemisza), et "La Vierge à l'Enfant avec saint Jérôme et saint François" (Francfort, Städel) en constituent les sommets. En même temps, le style devient plus sensible, la rudesse du modelé s'adoucit, les drapés excessifs se font plus ondulants. De plus, l'artiste s'attache à une vision synthétique au détriment du détail réaliste. Il ne se contente plus de reprendre des détails à des œuvres existantes mais transforme des compositions entières en schémas synthétiques.Les modernistes, cependant, ne se satisfont pas de cette interprétation selon laquelle alterneraient l'influence de Van Eyck et celle de Van der Weyden et que contredit le développement logique de l'œuvre de Petrus Christus. Mais y a-t-il bien développement logique? Ce fut le mérite de Pächt de répondre à cette question. Son point de départ fut la "Pietà" de Bruxelles dont W. Bode attribuait la paternité à Christus mais qu'il tenait pour un de ses derniers tableaux en raison de l'influence indéniable du langage formel du Maître de Flémalle et du motif de l'évanouissement de Marie repris à Van der Weyden. Pächt, se fondant sur le traitement pictural de l'ombre et de la lumière, démontra qu'il s'agissait d'une œuvre relativement ancienne, plus proche des portraits de 1446 et du "Saint Eloi" (New York, Met.) de 1449 que du style des volets du retable de 1452. L'auteur en tira la conclusion - par trop rigoureuse - qu'à ses débuts, Christus n'aurait subi l'influence eyckienne que dans ses portraits et, en conséquence, que les autres œuvres influencées par Van Eyck devraient être tardives. On peut dire, en résumé, que l'influence de Van Eyck, sur la composition autant que pour des motifs isolés, est surtout décelable dans les premières œuvres de Christus, toutes de petit format. Lorsqu'il lui fallut réaliser des panneaux de plus grandes dimensions, c'est au Maître de Flémalle et à Van der Weyden qu'il dut faire des emprunts. Pendant un certain temps, le traitement de la lumière et des drapés conserva encore quelque chose de la subtilité ancienne. Au cours des années, les contrastes s'accentuèrent, la plastique gagna en force et, parallèlement, le modelé devint plus sobre. En 1452, dans les volets du retable de Berlin, les influences de Van Eyck et de Van der Weyden se fusionnent. A notre connaissance, Petrus Christus n'eut aucun élève mais son style a été imité et l'on connaît des copies de la "Pietà" de New York (Met.) et de "La Vierge et l'Enfant" de Kansas City. Il a aussi apporté quelques innovations; on lui attribue la primeur de certains motifs tels que celui de la Vierge isolée, debout devant un paysage, ou la représentation de figures à mi-corps comme dans le tableau de "Saint Eloi". L'intérêt et l'importance de Christus résident aussi dans sa contribution à l'élaboration d'un espace pictural logique, déterminé par l'emploi de la perspective linéaire; il est le premier parmi les Primitifs flamands à en utiliser les lois à bon escient.

Rédacteur
Verrassel, Anne
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